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Chérif Kouachi, l’un des auteurs des attentats au siège de Charlie Hebdo à Paris, avait été placé sur écoute, entre novembre 2011 et fin 2013, ce qui avait incidemment permis de mettre au jour son implication dans un trafic de contrefaçon de vêtements et de chaussures de sport (Le Monde du 13 janvier 2015). Aux yeux de l’avocate Corinne Champagner Katz, spécialiste en droit de la propriété intellectuelle, c’est bien la preuve que la répression de la contrefaçon textile en France « est malheureusement descendue d’un cran depuis les années 2008-2009 et n’est aujourd’hui pas suffisante ».
La contrefaçon « est devenue le mode de financement préféré de nombreux acteurs de la criminalité mondiale organisée, affirme-t-elle. En France, les juges ont tendance à considérer que la mode n’est pas un secteur important, pas aussi fondamental que l’aéronautique ou la pharmacie, par exemple, et ils oublient que cela représente de nombreux emplois ».
Un gigantesque manque à gagner
Maître Champagner Katz regrette que « les condamnations prononcées, qui n’excèdent souvent pas 10 000 euros, n’empêchent absolument pas les contrefacteurs de recommencer, puisqu’ils gagnent en général dix à cent fois plus. De plus, ce délit est bien moins risqué pour les délinquants que le trafic de drogue ».
Les peines maximales (300 000 euros d’amende et trois ans d’emprisonnement) ne sont jamais appliquées dans la contrefaçon textile. Seule la saisie des biens d’un délinquant (compte en banque, voitures, biens immobiliers), pratiquée par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, semble efficace pour cette avocate.
Selon un rapport de la commission des lois à l’Assemblée nationale, ce trafic mondial représenterait environ 250 milliards d’euros par an, soit environ 30 % des revenus de la criminalité organisée. Rien qu’en France, cela équivaut à un manque à gagner de 6 milliards d’euros par an pour l’économie et entraînerait chaque année la destruction de 38 000 emplois, selon le ministère du commerce extérieur.