Lutter plus efficacement contre le piratage, mieux rémunérer les artistes… De nombreuses organisations africaines se sont enfin réunies pour plancher sur l’épineux problème.
Jeune Afrique 1 Oct 2017
Le continent africain reste un des plus mauvais élèves de la collecte des droits d’auteur : en 2016, les sommes rassemblées ont certes augmenté de 9,5 %, mais pour atteindre seulement 67 millions d’euros… soit 0,7 % des collectes mondiales. Il fallait frapper un grand coup pour secouer les gouvernements, qui souvent se contentent de constater, impuissants, la diffusion et la reproduction illégales d’œuvres dans leur pays. C’est chose faite grâce à la Confédération internationale des sociétés d’auteurs et de compositeurs (Cisac), qui a organisé une grande réunion étalée du 13 au 15 septembre à Alger. La capitale s’imposait. L’Algérie est le champion francophone de la collecte de droits (23 millions d’euros à elle seule en 2016). Elle a marqué les esprits par des opérations spectaculaires, comme la destruction au bulldozer de 2 millions de DVD et de CD pirates l’année dernière, et a introduit des pratiques nouvelles, comme les redevances sur les sonneries musicales des téléphones mobiles. Des créateurs et sociétés d’auteurs de 22 nationalités étaient cette fois rassemblés. « C’est la première rencontre qui réunit autant d’organisations en Afrique », se félicite Sami Bencheikh El-hocine, membre du conseil d’administration international de la Cisac et du comité exécutif africain, qui parle de moment « historique ». L’Algérie partage depuis plusieurs années ses bonnes pratiques et défend une stratégie de sensibilisation par le haut : l’onda, la société nationale de diffusion artistique, a d’abord fait du lobbying auprès du gouvernement et des hauts fonctionnaires, a sollicité la police nationale, la gendarmerie et les douanes, avant d’étendre le mouvement dans la société civile. Comme le précise Pierre Runiga, représentant de l’organisation régionale africaine de la propriété intellectuelle (Aripo), « l’objectif est aussi de mettre en place des organisations de gestion collective là où elles n’existent pas encore ». Création de structures, formation de cadres… Le chantier sera long, d’autant que l’achat de copies pirates d’albums musicaux ou de films reste aujourd’hui la norme. Mais Bencheikh El-hocine se veut confiant : « Les années à venir verront une forte progression des collectes en Afrique, cela est incontestable. » Les montants colossaux engrangés par le bon élève algérien devraient donner à eux seuls matière à réfléchir.